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Musique

Fleetwood Mac : trois albums pour le septième ciel

Stevie Nicks et Lindsey Buckingham ont propulsé Fleetwood Mac dans une dimension populaire et commerciale à la hauteur des plus grandes formations de l’histoire de la musique. Trois albums façonnés au milieu des années 1970, dont Rumours, expliquent le statut étoilé du groupe anglo-américain.

Rumours continue de toucher les cœurs. Sorti en février 1977, ce que beaucoup considèrent comme le chef d’œuvre de Fleetwood Mac est à ce jour une référence, entre autres, en termes de chiffres. A la fin 2022, l’album enregistré en Californie était classé septième parmi les plus vendus de tous les temps (source Fnac). Le bijou du quintet pop/rock/folk est resté 31 semaines en tête du Billboard –  classement du magazine de musique, référence aux Etats-Unis – et 612 semaines au total de présence dans les charts. 45 millions de disques avaient été écoulés en 2013 avant la réédition. On peut probablement en ajouter quelques millions de plus.

J’ai découvert Fleetwood Mac justement avec un morceau extrait de Rumours que l’on tentait de ne pas trop massacrer dans le garage d’une maison de l’arrière-pays aixois. Go your own way appartient aux nombreux incontournables du groupe fondé il y a près de 60 ans par le batteur Mick Fleetwood. Et c’est en écoutant un best-of (on le disait encore à l’époque !) sorti au début des années 1990, que j’ai été saisi d’une addiction hermétique à n’importe quelle cure. La voix de Stevie Nicks et la force des compositions avaient produit leurs effets désirables.

Trois albums ont transformé la vie du groupe, dans les années 1970, pour leur donner accès au Panthéon de la musique, du moins celui abritant les artistes de la pop rock, tendance blues en ce qui concerne les origines du band fondé en 1967, entre autres,  par Mick Fleetwood accompagné du fidèle John McVie dont une partie du nom complètera l’appellation du groupe.

En 2025, on célèbre avec gourmandise les 50 ans du premier album réalisé par la nouvelle formation, enrichie, et c’est le moins que l’on puisse dire, par le génial couple américain Nicks-Buckingham. Après la période originelle traversée avec Peter Green, guitariste et co-fondateur qui accoucha du célèbre Black Magic Woman sorti en single en 1968 et popularisé par le virtuose mexicain des six cordes Carlos Santana, Fleetwood Mac accueille en 1974 Stevie Nicks et Lindsey Buckingham. 

L’intégration des deux musiciens américains bouleverse la destinée et le statut du groupe qui avait vu, après le départ de Peter Green en 1970, passer les guitaristes Johnny Spencer, Danny Kirwan et Bob Welch. Finis les morceaux de blues/rock parfois ennuyeux ou sans étincelle, place à la touche pop sans renier pour autant quelques fondamentaux. Mais c’est bien plus que cela. On aurait pu voir Nicks et Buckingham dans un documentaire sur Laurel canyon.

Le duo américain a du talent et des morceaux plein les cartons. Lindsey Buckingham (guitare) et Stevie Nicks chantent et composent, autres atouts repérés par le boss du groupe, Mick Fleetwood. En 1973, l’album “Buckingham-Nicks” (uniquement accessible sur Youtube) démontre la force de leurs inspirations. Leur univers californien infuse le premier album de ce Fleetwood Mac nouvelle puissance.

1975, Fleetwood Mac révèle six compositions, parmi les onze de l’album, signées par l’un ou l’autre du duo encore en couple à ce moment-là. La voix caractéristique de Stevie Nicks s’apprécie encore mieux en version live (quand elle n’est pas trop abîmée par les addictions). La chanson Crystal, dernière de la face 1 figurait déjà dans l’album Buckingham-Nicks deux ans plus tôt, à peine retouchée. Monday Morning, Landslide et Rhiannon avaient été envisagés quand le couple avait commencé à travailler sur son deuxième album, au moment où Fleetwood Mac est venu les débaucher. Bonne pioche.

Lindsey Buckingham signe avec Christine McVie, épouse du bassiste John McVie, une première collaboration réussie, World Turning. Le guitariste et compositeur prend d’entrée une place majeure dans la formation. Deux de ses morceaux, Monday Morning et I’m so afraid, sont choisis pour ouvrir et refermer l’album. Fleetwood Mac, 10e album studio du groupe paru en juillet 1975, se vendra à 5 millions d’exemplaires, à peine quelques centaines de milliers pour les précédents.

John McVie a expliqué le succès du groupe par la puissance des trois compositeurs (Christine McVie, Stevie Nicks et Lindsey Buckingham) qui sont aussi les trois voix. Deux femmes au chant dans un groupe de rock n’était pas l’usage à cette époque. “Il y a toujours eu quelque chose de mystique dans Fleetwood Mac”, confiait Stevie Nicks dans un média britannique (New Musical Express) .

Rumours constitue le deuxième étage de la fusée. La déchirure sentimentale du couple Nicks/Buckingham donne naissance notamment à Go on your way, par ailleurs titre de la copieuse bande originale de Forrest Gump. Stevie Nicks entretiendra une aventure avec le batteur Mick Fleetwood. Les deux artistes illustrent d’ailleurs la pochette d’un album magnifié par le fondant Dreams, You Make Loving Fun, Don’t Stop, I don’t want to know ou encore Gold Dust Woman.

Fleetwood Mac est le groupe de rock à avoir vendu le plus d’albums en 2024, selon le classement Billboard, rappelait Rock and Folk, grâce à Rumours, classé en 34e position. Une réédition de 2004 a eu la très bonne idée d’inclure Planets of the universe, autre délice de Miss Nicks non retenu à l’époque. Lindsey Buckingham accompagne son ex à la guitare et au chant, dans la même veine que celle de leur unique album (1973).

Tusk, sorti en octobre 1979 et  enregistré à Los Angeles, achève le triptyque en même temps que la décennie 1970, tellement prodigieuse. Certaines critiques ont décrypté ce double-album comme plus varié que d’habitude, avec Lindsey Buckingham à la baguette. Plusieurs titres cadrent très bien avec l’esprit des deux précédents. Je pense aux bonnes œuvres de Stevie Nicks. La jeune femme dégoupille une bombe en trois parties : Sara, Beautiful child et Sisters of the moon.

Tusk, écrit par Lindsey Buckingham, peut surprendre. Probablement par la participation du  Trojan Marching Band  cette fanfare de l’université de Californie aux 112 membres, et le lieu de l’enregistrement, le Dodgers Stadium. A l’époque, Tusk a été estimé l’album rock le plus onéreux avec un peu plus d’un million d’euros de budget.