C’est la version plutôt osée livrée par Muhammad Usman au procès des attentats du 13 novembre 2015. L’accusé pakistanais s’est fait passer pour un naïf téléguidé par l’état islamique.
Si les débats ont repris, la parole des accusés a été différée mardi 25 janvier. L’audition de Muhammad Usman se trouvait bien au programme du 70e jour d’un procès perturbé par la pandémie. Avant d’entendre ce Pakistanais, supposé âgé de 28 ans, il a été longtemps question de la recevabilité d’éléments le concernant.
La cour est parti délibérer presque deux heures pour valider les six pièces versées au dossier par le Parquet national anti terroriste (Pnat) entre juillet et fin octobre 2021. Rien n’avait été soulevé à ce moment-là, a expliqué notamment le président Jean-Louis Périès en rendant l’avis.
Parmi les éléments contestés en bloc par Maître Huylebrouck, un des conseils de celui qui encourt 20 ans de réclusion criminelle, figure une vidéo de propagande de l’EI trouvée le 29 février 2016. On y reconnaît sans difficulté, mentionne l’accusation, Usman. Il a dit à l’audience être parti en Syrie à l’été 2015, sans préciser le mois.
N’était-il pas arrivé plus tôt sur la zone de combat en novembre 2014 ? Cela expliquerait son identification par la DGSI (film estimé tourné en mai 2015), demande le président. Usman se veut catégorique depuis le box. C’était en 2015. Mais les doutes ne cesseront de grandir mardi au fur et à mesure de ses déclarations.
Muhammad Usman n’a visiblement pas convaincu la cour sur les motivations de son départ en Syrie, ses activités sur place – il ne faisait rien à part aller à la mosquée – ou le statut de taliban notoire que les renseignements pakistanais lui ont collé.
A Raqqa (Syrie), l’accusé dit avoir refusé dans un premier temps une « action violente en France » ordonnée par Oussama Atar (Abou Ahmad). Mais il a obéi finalement, pris par l’émotion de voir une vidéo de bombardements français tuant des femmes et des enfants.
Il est parti de Syrie en compagnie des deux Irakiens qui se sont fait exploser au Stade de France, et d’Adel Haddadi (autre accusé dans le box). Arrêté en Grèce pour de faux passeports, il a séjourné en prison entre le 3 et le 28 octobre 2015.
Le 2 novembre, lui et Haddadi ont reçu de l’argent par O. Atar afin de poursuivre le voyage vers la France. Arrivé en Autriche, M. Usman apprend une nouvelle qui change tout, assure-t-il ce 25 janvier 2022.
« Choqué », dit-il, par les attentats du 13 novembre, il a décidé d’enlever le costume de futur kamikaze. « Je ne pensais pas que ce serait de cette ampleur. » Il n’avait pas non plus établi le rapport avec ses deux compagnons de route irakiens, les terroristes à la ceinture explosive de Saint-Denis.
Muhammad Usman s’est présenté à la cour comme un être au cerveau retourné à l’époque par un inconnu sur Facebook, l’ayant convaincu de partir au Shâm. Il a ensuite suivi à la lettre les directives d’un cadre de l’EI sans rien savoir sauf qu’il était programmé pour mourir en martyr.
Les efforts de réduire son implication dans la cellule responsable des massacres de Saint-Denis, Paris et Bruxelles n’ont pas rencontré de succès.