Histoires de stades et de tribunaux

Justice

Au procès Kriket, on a flirté avec la Syrie

(Crédit: Alexandre Sarkissian)

Au 12e jour des débats, la cour s’est penchée sur l’entourage proche d’Anis Bahri. Il a été question de tentatives de passage en Syrie.

« Adana est aussi un art culinaire, une sorte de kefta. » Il ne manquait plus que le triptyque salade, tomate, oignon pour baigner pleinement dans l’atmosphère d’un kebab. Pourquoi l’avocate de Miloud F. nous a sorti cette comparaison entre la ville turque et les boulettes de viande mélangée à des épices ? Adana n’est pas qu’une simple ville de transit pour la Syrie. Voilà le message. T. Bahri ne l’a pas choisie pour cela quand il s’y est rendu en octobre 2015.

Le frère d’Anis Bahri, un des trois idéologues de la cellule d’Argenteuil selon l’accusation, assure qu’Adana constituait pour lui un endroit favorable pour faire fructifier ses futures affaires. A cette époque, il voulait rebondir, dit-il, après un premier échec dans la restauration en Tunisie.

Le président de la cour est plus que sceptique ce 23 mars, au douzième jour du procès Kriket. Face au jeune homme de 32 ans, que la salle aperçoit en visioconférence, il ne comprend pas pourquoi il a passé d’abord trois semaines en Thaïlande, une dizaine de jours en Malaisie, avant de débarquer à l’aéroport d’Istanbul.

T. Bahri voulait s’offrir des vacances depuis deux ans au moins et il l’avait promis à son épouse. « Votre séjour en Thaïlande n’avait donc pas comme objectif de tromper les autorités tunisiennes », glisse le président. A Istanbul, les locaux commerciaux pour ouvrir son futur snack ne rentrent pas dans son budget. Alors direction Antalya, où T. Bahri retrouve Miloud F., un des sept accusés renvoyés devant la cour d’assises.

Accompagné de sa femme, enceinte, et de leur jeune fils, T. Bahri passe ensuite une quinzaine de jours à Adana. « On a réussi à trouver un local à la fin mais on s’est fait interpeller. »

Un policier turc avait rencardé T. Bahri au sujet de l’hôtel. L’établissement avait la réputation d’un passage prisé des candidats au djihad. Ce mardi, il est resté droit dans ses bottes. Il n’avait aucune intention de partir en Syrie. Son épouse avait dit à peu près le contraire aux enquêteurs.

Pour elle, T. Bahri voulait l’emmener en Syrie avec son enfant, et Miloud F. se trouvait là pour faciliter le passage en Syrie. Le grand frère Anis Bahri avait servi d’intermédiaire entre les deux hommes. Ce dernier aura l’occasion de s’expliquer mercredi.