Histoires de stades et de tribunaux

Justice

Tyler Vilus, djihadiste en formation accélérée

(Crédit: A.S.)

Consacrée à l’étude de sa personnalité, la première journée du procès de Tyler Vilus a révélé le parcours d’un candidat à un groupe terroriste marqué par l’ascension assez rapide au sein de l’Etat Islamique. Le natif de Troyes encourt la réclusion à perpétuité.

Il n’a pas le souvenir d’avoir vu ses parents ensemble. Tyler Vilus n’a que trois ans quand ils se séparent au début des années 1990. Il n’en connaît pas les raisons. Il est élevé par sa mère également en charge de son demi-frère. Sa scolarité sans embûche du côté de Troyes, où il est né, s’obscurcit à la fin du primaire. Celui qui comparaît depuis jeudi pour « direction d’une association de malfaiteurs criminelle » et « meurtre en bande organisée en relation avec une entreprise terroriste » est un élève turbulent et absent en 6e et 5e, témoigne devant la cour d’assises de Paris spécialement composée un enquêteur chargé début 2016 d’étudier sa personnalité.

Au collège des Jacobins de Troyes, Vilus intimide un professeur et se voit à nouveau exclure d’un établissement. Son passage dans une 3e professionnelle puis celle classée « découverte » ne va pas le réconcilier avec les études. 2005-2006 sonne l’abandon de son cursus. Entre 16 et 21 ans, l’accusé profite de la vie avec des amis, comme il dit à la Cour, et entre dans la petite délinquance, décrit-il. « On bougeait à droite à gauche, Toulouse, Troyes, Paris, on avait toujours quelque chose à faire…. ma mère n’avait pas de prise sur ce que je faisais. »

En 2011, il s’inscrit en région parisienne dans un un centre de formation d’apprentis (CFA). Ce père de deux petites filles y rencontre des « frères qui lui montrent le chemin du salut », dit-il à l’enquêteur. C’est l’heure de la conversion. Et tout s’accélère, à l’image de son appétit pour la connaissance du Coran qu’il dévore durant trois jours, témoigne un psychologue dans la salle d’audience. Quelques mois plus tard, il rejoint la Tunisie pour vivre sa foi en conformité avec ses convictions, précise encore à la barre l’enquêteur de personnalité.

Octobre 2012, il part en Syrie une première fois avant d’y retourner à partir de mars 2013. Là aussi, sa carrière de combattant se construit à un rythme assez soutenu. Après avoir fréquenté le groupe Jabbat Al Nusra, il devient membre de l’Etat islamique en Irak et au Levant  (EIIL) qui deviendra l’Etat Islamique fin juin 2014 au moment de la proclamation du califat, rappelle, anonyme, un chef de service de la DGSI (DCRI à l’époque). Selon l’accusation, Tyler Vilus aurait grimpé les échelons de l’organisation, appartenant notamment à une police chargée de faire appliquer la charia.

Il est également soupçonné d’avoir participé à la commission d’exactions et d’assassinats et  d’avoir voulu commettre des attentats en France. Il se fait arrêter le 2 juillet 2015 à l’aéroport d’Istanbul avec un passeport suédois authentique. Premier djihadiste français à être renvoyé pour assassinat en zone irako-syrienne devant une cour d’assises française, il encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le procès doit s’achever le 3 juillet.