Histoires de stades et de tribunaux

Justice

Merah: « Votre monde, celui de la haute bourgeoisie »

(Crédit: Alexandre Sarkissian).

La deuxième semaine du procès des tueries de Toulouse et Montauban s’est achevée avec une après-midi entièrement consacrée à l’audition d’Abdelkader Merah. Il était principalement question du vol du scooter. Complice ou pas ?

Dans le quartier des Izards, on ne dénonce pas. Les frères Merah ont grandi et vécu dans cet endroit de Toulouse, souvent source de faits divers liés au trafic de drogue. Quand Abdelkader Merah est interrogé sur l’identité de celui qui les a accompagnés en voiture, son frère et lui dans une Clio noire lors du vol du scooter le 6 mars 2012, il se garde bien de se mettre à table. Il ne souhaitait pas que « le collègue » devienne son « voisin de prison injustement », a-t-il répété vendredi après-midi à la barre. La culture de la rue n’aime pas les donneurs. Le frère du tueur de Toulouse et Montauban, dans le box pour complicité d’assassinats, va finir à l’époque par lâcher le morceau aux enquêteurs.

Le troisième homme s’appelle Walid Larbi-Bey, concède A. Merah après la mort de ce dernier, au cours d’un règlement de compte en août 2014. L’accusation se contente donc cinq ans après, à l’occasion de la 10e journée du procès, de la version d’Abdelkader Merah. Le 6 mars, il se trouve en voiture avec son frère, direction un carrossier: « Il m’a demandé de m’arrêter. Et puis je l’ai revu sur un scooter » (celui ayant servi aux attentats). Depuis le début des audiences, le frère aîné persiste. Il n’a rien vu du vol et il ne savait pas ce qui se tramait.

Il nie la préméditation du vol

Abdelkader Merah se dit même envahi par la colère ce jour-là. Il en veut à son frère: « En tant que musulman, ce vol de scooter a été un moment très désagréable pour moi. J’ai été otage de tout ça .» Ce qui lui vaut son placement en détention depuis mars 2012. L’accusation le soupçonne d’avoir participé volontairement à ce forfait supposé prémédité. A. Merah nie tout cela. La veille, le propriétaire du deux roues volé a déclaré que le voleur faisait sans doute le guet avant d’enfourcher la machine. Le président de la Cour a rappelé vendredi que lors de sa 9e audition, après son interpellation en mars 2012, A. Merah avait indiqué se douter que son frère allait commettre des larcins avec l’engin. Ce 6 mars, Abdelkader Merah ne semble pas en vouloir tant que ça à son petit frère, comme il l’appelle.

Une heure après le vol, il lui achète un blouson dans un magasin spécialisé. Une manière assez originale pour marquer son mécontentent, relève le président. « Votre monde, celui de la haute bourgeoisie, est différent du notre », explique Merah. Cette solidarité familiale, ou la capacité de pardonner très rapidement, pousse Abdelkader Merah et le troisième homme à planquer le T-Max. « S’il y avait eu préméditation, se défend A. Merah, pourquoi s’embêter à chercher un endroit pour le cacher ? » La partie civile n’arrivera pas ce 13 octobre à déstabiliser l’accusé. Le chapitre sur son engagement religieux marqué par sa supposée appartenance à la mouvance salafiste radicale toulousaine, sera abordé à partir de la semaine prochaine.

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