Histoires de stades et de tribunaux

Justice

Procès du « Logeur de Daesh », acte II : Au tribunal, rien de nouveau

(Crédit A.S.)

Le deuxième jour du procès en appel du  « Logeur de Daesh », a mis à nouveau en évidence la fragilité du discours de Youssef A., condamné en première instance pour non dénonciation de crime terroriste. Le cousin d’un des terroristes du 13 novembre 2015 est retombé dans ses incohérences.

Le mouvement de grève « justice morte » n’a pas eu d’effet sur la cour d’appel qui se penche actuellement sur le procès dit du « Logeur de Daesh. » Le vice-bâtonnier Basile Ader, soutenu par « solidarité » par Maître Nogueras, le conseil de Jawad Bendaoud, avait demandé le report de l’audience de ce jeudi, deuxième journée des débats. Le président et ses assesseurs se sont réunis une petite minute pour revenir annoncer sans grande surprise : « La cour va commencer l’examen de cette affaire. » Youssef A, condamné en première instance à quatre ans de prison dont un avec sursis pour « non dénonciation de crime terroriste », s’est donc avancé à la barre pour une audition de 2h45.

Qu’a-t-on appris de nouveau ? Rien de bon en faveur de l’intéressé, toujours aussi incohérent dans les arguments qu’il a tenté de défendre. Le 25 janvier, en première instance, Youssef A. avait dit : « Je n’avais pas la ferme conviction que c’était Abaaoud. » Jeudi, la cour lui a rafraîchi la mémoire en remontant à ses premières auditions. Dans l’une des trois versions qu’il avaient livrées à l’époque, il avait dit « J’ai compris que c’était le cousin Abaaoud, mais je ne voulais pas la croire », au sujet de sa soeur, Hasna, qui lui demande à partir du 15 novembre 2015 d’héberger un des assassins des terrasses parisiennes ensanglantées deux jours plus tôt. C’est ce qu’il ressort des investigations policières après l’exploitation de la téléphonie.

« Vos déclarations sont évolutives monsieur. Et aujourd’hui ? », lui lance le président. « Je n’ai pas de souvenirs exacts et puis quand elle me parlait d’une personne, elle était incohérente, c’était un cousin, puis une cousine, puis l’ami du cousin, elle me raconte n’importe quoi à ce moment-là », insiste Youssef A. Il n’alerte pas les autorités bien que le sérieux doute que ce soit Abdel Hamid Abaaoud, lui a reproché la justice. « On disait qu’il avait commandité les attentats depuis la Belgique, il ne pouvait pas être en France », rétorque l’ambulancier de 26 ans.

Il se présente en revanche au commissariat (après l’assaut donné par le RAID le 18 novembre à Saint-Denis) avec deux de ses téléphones dont un a subi « un effacement massif », selon un rapport cité par la cour. « J’ai rien effacé du tout ? Le téléphone était tout neuf .» Le prévenu contredit des experts qui n’ont pu, en revanche, démontrer un des arguments de Youssef. A, ce dernier affirmant depuis le début avoir bloqué le téléphone de sa soeur à partir du 15 au soir.  Il n’a donc pu recevoir et consulter des communications (conversations, messages, MMS, échanges sur applications…) compromettantes pour son cas.

« Au nom d’Allah, le tout miséricordieux »

Si les enquêteurs n’ont pas pu prouver le nettoyage du téléphone, la carte SIM du deuxième ayant été réduite à néant par Youssef A. dans une chasse d’eau, le prévenu demande quand même à la cour de croire en sa bonne foi. « Je vais vous dire quelque chose M. Le président, au nom de ce que j’ai de plus cher, au nom d’Allah, le tout miséricordieux, le très miséricordieux, je la bloque le 15 novembre, que ce soit bien clair dans la tête des gens. »

Le chapitre consacré à son engagement religieux, évoqué en fin d’audition, a confirmé toute l’attention que portait Youssef A. à être un bon musulman. Mais pourquoi tous ces documents à caractère terroriste trouvés dans son ordinateur ? « Vous savez, M. le président, je suis très curieux…, assure face à la cour, C’est est une goutte d’eau dans mon disque dur, pourquoi mettre l’accent sur ça ? J’ai plein d’autres choses qui parlent de tolérance, du vivre ensemble, de dialogue social… » Vendredi, les avocats des parties civiles auront l’occasion d’en savoir plus eux aussi sur le cousin d’Abaaoud. Le président lui a rappelé qu’il avait le droit de ne pas répondre.

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