Histoires de stades et de tribunaux

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Pastor Alwatik trahi par l’ami Coulibaly ?

Palais de justice de Paris.

Palais de justice de Paris, 2e étage. (© - Alexandre Sarkissian).

Proche d’Amedy Coulibaly, Nezar Mickaël Pastor Alwatik assure ne pas avoir vu la radicalisation chez son ami et encore moins qu’il préparait les attentats de Montrouge et de l’Hyper Cacher. Le témoignage de son ancienne épouse, qui abîme cette ligne de défense, est considérée par l’accusé comme farfelue.

« Alors Karim Benzema est salafiste ? » Nezar Mickaël Pastor Alwatik s’agace des insinuations de Maître Samia Maktouf qui, selon l’accusé, le catalogue comme un rigoriste. Pourquoi ? Car il est un adepte de la hijama, une méthode thérapeutique donnant également satisfaction à l’attaquant français du Real Madrid et à d’autres footballeurs. En ce début de semaine, aux 30e et 31e jours du procès des attentats de janvier 2015, la cour d’assises spécialement composée essaye d’en savoir plus sur l’engagement religieux de l’homme de 35 ans.

Celui qui encourt 20 ans de prison refuse l’étiquette malgré la proximité assumée avec Amedy Coulibaly, connu en prison quand les deux hommes travaillaient à la buanderie. Coulibaly avait trouvé la future femme de Pastor Alwatik. « Je n’ai pas de pratique rigoriste de l’Islam. Je ne suis pas un salafiste », répète-il.

En fréquentant à l’époque le futur terroriste de Montrouge et de l’Hyper Cacher, Nezar Alwatik se serait laissé convaincre par l’idéologie violente prônée par Coulibaly, soupçonne l’accusation. C’est aussi le sentiment confié par son ancienne épouse religieuse, auditionnée lundi.

Mariée d’août à novembre 2014, Chaineze H. relate à la barre quelques exemples ambigus, selon ses mots, susceptibles de fragiliser la défense de Pastor Alwatik. La Cour et les avocats des parties civiles l’interrogent assez longuement sur ce soir où elle voit arriver Amedy Coulibaly et sa compagne Hayat Boumeddiene ainsi que Mohamed Belhoucine. Au programme, un dîner et un rappel religieux consacré au mariage. C’est ce quelle croit.

Chaineze H. entend la teneur du rappel mené par Belhoucine, bien que les hommes (au salon) et les femmes (dans une chambre) soient séparés. Le discours incite à la haine et transpire l’antisémitisme. Une semaine après le mariage, se souvient encore la jeune femme, elle s’étonne « de propos équivoques » tenus par son époux. Il estimait que le roi du Maroc était un mécréant. Une autre fois, il lui aurait confié vouloir accomplir le djihad armé après avoir mis sa femme et sa mère en sécurité.

Dans cette période, l’ex-épouse de Mickaël Pastor pense que son mari pouvait appartenir à la secte des takfiris, affiliée aux Khawaridj, notamment après avoir entendu les rappels. Dit-elle tout cela car elle veut se venger après avoir été répudiée ? En aucun cas, assure-t-elle devant la Cour, confirmant sa version tenue en garde à vue devant les enquêteurs il y a plus de 5 ans et lors de la confrontation organisée avec Nezar Alwatik.

Dans la salle 2.02, l’accusé contre-attaque. Son ex dit n’importe quoi, perturbée peut-être par des traumatismes ou des problèmes psychologiques, sous-entend-il avec des propos irrespectueux. On l’a vu ricaner quand Chaineze H. est passée devant lui en arrivant dans la salle, conforté par les gloussements de ses voisins de box.

Sa demi-soeur, de confession juive, va le décrire comme une personne pratiquante inoffensive et certainement pas comme un sympathisant d’une doctrine qui a fait des mécréants et des juifs ses ennemis. Nathalie P., 17 ans son aînée, dépeint un « Mimi » joyeux et prévenant à l’occasion des fêtes de familles. Elle insiste sur la complicité qu’il entretenait avec ses nièces. L’oncle rigolard, quoi.

Le problème de Nezar Mickaël Pastor Alwatik est peut-être d’avoir eu comme ami Amedy Coulibaly qui l’a bien eu, dit-il, en lui cachant la vérité et le côté mortifère de sa personnalité. « Qu’est-ce que je peux reprocher à mon frère ?, se demande sa demi-soeur. Si ma meilleure amie s’était mise à tuer des gens, je ne l’aurais pas vue. Mon frère n’a pas pu être au courant de tout ça, j’en suis sûre et certaine.»